13 Mai 2023
Cet article explique comment interpréter les informations techniques d'un moulinet pour savoir à quoi s'attendre avant de réaliser un achat.
Chaque point abordé sera ensuite développé dans une série d'articles avancés (plus techniques) destinés à tous ceux qui souhaitent en apprendre davantage.
Depuis l’ouverture du blog, je reçois régulièrement des questions sur le matériel. Ces questions ont été à l'origine de plusieurs articles sur les cannes qui semblent cristalliser votre attention. En revanche, j'avais encore très peu écrit sur les moulinets bien qu'il y ait beaucoup à dire à leur sujet.
Je vous propose donc aujourd'hui de faire le tour des caractéristiques qui figurent sur la fiche produit d’un moulinet pour vous aider à mieux les comprendre et savoir faire la part des choses car elles ne sont pas toutes d'une grande clarté ni de même valeur pour la pratique du surfcasting.
Les données de poids et de contenance ne souffrent d'aucune ambiguïté, en revanche les roulements, le ratio, le taux de récupération, la taille et les matériaux sont beaucoup plus confus et méritent quelques explications pour vous aider à comprendre leur implication sur le comportement du moulinet.
Ceux d'entre vous qui comprennent déjà bien ces différentes notions pourront aller lire directement la version avancée et approfondie de ce contenu dans la série d'articles approfondis.
Exprimé sous la forme X+1 ou X/1
Sur les moulinets modernes à tambour fixe, le nombre de roulements est indiqué sous la forme X+1 ou X/1. X représente le nombre de roulements à billes tandis que la mention "+1" indique la présence d'un roulement à rouleaux. Ces deux types de roulements ont des rôles bien différents dans la mécanique du moulinet.
Le roulement à rouleaux (appelé aussi roulement à aiguilles ou à galets) appartient au mécanisme d’anti-retour infini. Il n’a pas vocation à réduire les frictions mais à bloquer le pignon sans laisser de jeu.
Les roulements à billes ont quant à eux la mission de réduire les frictions des pièces en rotation pour améliorer la fluidité du moulinet (vous vous en doutiez certainement).
Il n'est pas nécessaire de posséder un grand nombre de roulements pour qu'un moulinet de surfcasting soit agréable à l'usage, 5 roulements de bonne qualité et correctement placés suffisent à obtenir un niveau de souplesse très satisfaisant (4 dans la mécanique interne + 1 dans le galet guide fil). Tout roulement supplémentaire pourra ensuite améliorer légèrement le confort en soulageant des frictions secondaires mais le gain de fluidité ainsi obtenu sera beaucoup moins perceptible par votre main qu'il ne l'est avec les 5 premiers roulements.
Le plus important sur un moulinet de surfcasting est que chaque roulement à billes ait une utilité réelle de part sa position dans le produit (chose que l'on peut difficilement savoir sans ouvrir le moulinet ou sans lire le plan des pièces). Juxtaposer des roulements peut s'avérer nécessaire pour répondre à des contraires de taille/dimension mais n'apporte alors rien de plus sur le plan mécanique qu'un roulement unique.
Exprimé sous la forme X:1 ou X/1
Le ratio représente le nombre de rotations effectuées par le rotor autour de la bobine pour 1 tour de manivelle. Il y a donc une relation entre le ratio du moulinet et sa vitesse de récupération (nous reviendrons dessus un peu plus bas).
Le ratio du moulinet est déterminé par la taille et la forme de ses engrenages principaux (roue et pignon). Il est donc assez rare qu'un modèle de moulinet de surfcasting soit décliné en plusieurs ratio sans qu'il s'agisse de tailles différentes. Cela existe cependant chez les marques japonaises, pour quelques modèles seulement.
Pour les modèles concernés, la déclinaison de ratio supérieur présente alors un taux de récupération plus élevé.
En revanche, le moulinet de ratio inférieur offre un mécanisme plus puissant qui réduit l'effort requis pour tourner la manivelle (surtout lorsqu'il y a un poids mort à treuiller au bout du fil) et améliore sensiblement la douceur de la mécanique lorsqu’on récupère la ligne.
Connaître le ratio du moulinet n'est pas d'une très grande importance dans la pratique des pêches à fond. Inutile donc de vous soucier du ratio pour choisir un moulinet de surfcasting, il s’agit d’une information secondaire qui n’intéresse que quelques inconditionnels des ratios bas (très à la mode en Espagne par exemple).
Exprimé en centimètre par tour de manivelle | Abréviation : TMV
Le taux de récupération est une valeur exprimée en centimètres qui représente la longueur de ligne rembobinée à chaque tour de manivelle. Il est calculé à partir du ratio du moulinet et de la circonférence interne de la bobine.
Si le ratio du moulinet est fixe, la circonférence interne de la bobine ne l'est pas. Elle évolue tout au long de la récupération du fil car dépend du niveau de remplissage de la bobine.
Cela implique qu'en action de pêche votre taux de récupération réel va varier et sera la majorité du temps plus faible que ce qui est annoncé par la marque car les fabricants de moulinet indiquent généralement la valeur maximale du taux de récupération (c'est à dire calculée sur la base d'une bobine pleine).
Vous pouvez vous amuser à calculer le taux de récupération (TR) de vos moulinets en appliquant simplement la formule suivante :
Pour illustrer le calcul, j'ai pris comme exemple mon Shimano MgS XSB dont la marque annonce un TR de 102cm par tour de manivelle et un ratio de 4.3.
J'ai mesuré le diamètre de ma bobine remplie de fil au moyen d'un pied à coulisse et trouve 7.55cm.
Je retrouve ici le TR de 102cm annoncé par la marque, CQFD.
Sur les descriptifs des moulinets, on peut trouver des informations se rapportant au procédé d'enroulement du fil et/ou au mécanisme d'oscillation. Ces notions un peu floues méritent une petite explication d'autant plus qu'elle sont liées l'une à l'autre.
La technique d'enroulement du moulinet définit la disposition des spires de fil sur la bobine (la manière dont elles sont rangées les unes par rapport aux autres et leur inclinaison). Cette disposition est directement corrélée au rythme du mécanisme d'oscillation qui régit l'allure du va-et-vient de la bobine pendant la récupération, un mouvement nécessaire pour répartir convenablement le fil sur la bobine.
Un enroulement croisé est le résultat d’une oscillation standard à rapide. Il s'agit d'une vitesse d'oscillation élevée qui entraîne un écart significatif entre les spires et une inclinaison prononcée sur la bobine. La superposition des spires montantes et descendantes forme un angle important (les spires sont fortement croisées).
A l'inverse, un enroulement par spires jointives est la conséquence d’une oscillation lente. Ralentir l'oscillation a pour effet d'enrouler les spires plus proches les unes des autres jusqu'à ce qu'elles deviennent quasiment jointives en cas d'oscillation très lente. L'inclinaison des spires sur la bobine est alors infime (elles sont presque perpendiculaires à la bobine).
Entendons nous bien, ici aussi les spires montantes et descendantes finissent forcément par se croiser mais l'angle qu'elles forment en se croisant est très fermé.
Je suis certain que la question vous brûle les lèvres : vous souhaitez savoir quelle méthode d'enroulement est la meilleure, n'est-ce pas ?
Désolé de vous décevoir mais il n'y a malheureusement pas de réponse unanime sur le sujet. Vous trouverez d'un côté les inconditionnels de l'enroulement croisé et de l'autre les fervents d'adeptes de l'enroulement par spires jointives (ou oscillations lente et super lente mises à l'honneur d'abord par Shimano).
L'enroulement par spires jointives est prétendu faciliter la libération du fil lors du lancer. Il est vrai qu'en comparant mes différents moulinets Shimano, je remarque que le fil sort quasiment tout seul et sans bruit sur le modèle à oscillation super lente de type Super Slow 10.
Toutefois, l'enroulement Super Slow 10 est parfois un peu capricieux à mon goût. Il m'arrive régulièrement d'avoir une spire de fil sous-jacente qui se relâche et entraîne une perruque (essentiellement sur des bobines coniques à lèvre ouverte), chose qui ne m'était jamais arrivée avec des enroulements où les spires sont davantage croisées.
Selon moi, les oscillations lentes de type Shimano Super Slow 5 et Daiwa Slow Cross Wrap (SCW) représentent un excellent compromis entre performance de lancer et facilité d'utilisation. Le fil se libère très bien et les spires sont suffisamment croisées pour limiter le risque de perruque, même sur une bobine pleine à ras bord.
Quoi qu'il en soit, beaucoup de moulinets modernes sont sensiblement équivalents sur la performance de lancer malgré des techniques d'enroulement différentes. On parle d'écarts inférieurs à 5% dans la grande majorité des cas, il n'y a pas de quoi révolutionner votre manière de pécher.
Les fabricants de moulinet indiquent parfois le type de mécanisme utilisé pour diriger l'oscillation. Cette information n'est pas des plus importantes en elle-même mais je vais quand même vous donner quelques repères pour comprendre de quoi il s'agit.
La plupart des moulinets modernes intègrent un mécanisme d'oscillation à double vis sans fin ("worm shaft" en anglais). Ce mécanisme a gagné la faveur des fabricants au fil du temps car il délivre une oscillation douce et régulière, il simplifie l'usage de bobines de grande hauteur et il est facile d'adapter sa vitesse pour produire des oscillations lentes à super lentes. Daiwa qualifie ce mécanisme de "double oscillation". Chez Shimano, il porte le nom "Aero Wrap".
Les mécanismes d'oscillation à engrenage et came donnent une oscillation standard à rapide. Il existe plusieurs variantes impliquant des formes d'engrenages parfois surprenantes (oval, carré arrondi) permettant de varier la vitesse d'oscillation pour éviter l'accumulation de fil aux abords des lèvres de la bobine. On parle parfois d'oscillation à deux vitesse (exemple : Shimano Varispeed). Bien que robuste, fiable et économique, ce type de mécanisme tend à disparaître sur les moulinets de surfcasting modernes au profit de la double vis sans fin.
Ce paragraphe n'a pas vocation à vous aider à choisir la taille adequate d'un moulinet mais plutôt à expliquer les éléments physiques et techniques auxquels elle correspond.
La taille des moulinets est communément exprimée par un nombre qui permet de les distinguer entre eux au sein d'une même marque et d'une même gamme. D'une gamme à l'autre et d'une marque à l'autre, les repères peuvent changer.
La numérotation de la taille d'un moulinet moderne de surfcasting renvoie soit à la contenance de sa bobine (une pratique courante depuis de très nombreuses années), soit à la hauteur de la bobine en mm (tendance plus récente qui vient du japon).
Déterminer l'encombrement du moulinet (sa taille physique) sur la base de la numérotation n'est pas forcément simple, mieux vaut avoir vu le produit en magasin pour s'en rendre compte.
Pour les moulinets qui expriment la hauteur de la bobine, vous allez rapidement observer une correlation avec la taille du bâti (son corps). C'est logique puisque celui-ci doit pouvoir accueillir l'axe qui porte la bobine, une grande bobine impose un axe de grande taille donc un grand bâti. En revanche, rien ne nous permet de savoir quel sera le diamètre de la bobine et cela peut beaucoup changer d'une marque à l'autre (quand Shimano a des bobines de 76mm de diamètre sur des moulinets de grande taille, celles de Daiwa sont plutôt comprises entre 65 et 68mm).
Les choses se compliquent un peu sur les moulinets dont le numéro de taille renvoie à la contenance de la bobine. En effet, un moulinet peut être décliné en différentes tailles sans changer de bâti mais en modifiant simplement les contenances des bobines qui l'accompagnent (seul le diamètre intérieur des bobines varie, le diamètre extérieur reste le même). C'est très courant et peut parfois induire en erreur.
En résumé, on peut dire que si la contenance du moulinet ne présage pas nécessairement de ses dimensions physiques, les cotes de la bobines ont une conséquence sur l'encombrement final du moulinet. En surfcasting, choisir une taille de moulinet revient à chercher un compromis entre la contenance, l'encombrement et le poids. Selon les usages les plus courants auxquels vous le destinez, il sera préférable d'opter pour une taille plutôt qu'une autre.
Taille de bâti | Bobine | Usages privilégiés |
---|---|---|
Bâti moyen ou compact | Standard | Pêche en surf léger ou pêche depuis un ouvrage (digue, quai). |
Bâti grande taille | Faible contenance | Pêche fine à longue distance ou lignes en tresse. |
Grande contenance | Pêche à reculer ou traque des gros prédateurs. |
Exprimé en Kg
Plusieurs informations sont habituellement communiquées par les marques au sujet du frein du moulinet : sa composition, sa puissance, sa rapidité et sa précision de réglage.
La puissance du frein, exprimée en kilogrammes, représente la force de traction maximum à laquelle il peut résister avant de se libérer. Nous avons rarement besoin d'un frein très puissant pour combattre les poissons des côtes françaises mais en revanche nous avons besoin qu'il soit en mesure de supporter la pression du lancer. Plus vous pêchez avec des plombs lourds et plus votre technique de lancer est puissante, plus la force de votre frein devra être élevée. La grande majorité des moulinets de surf lourd offrent une puissance confortable de 15kg à 20kg. Je suis personnellement hésitant envers les modèles qui affichent moins de 10kg.
La composition du frein permet d'anticiper son comportement et sa longévité. Ainsi, les feutrines nécessitent un petit entretien pour durer dans le temps et fournir un frein progressif (il faut les graisser). Les rondelles en carbone sont plus robustes, peuvent fonctionner sans graisse mais il est d'usage de les graisser là aussi pour obtenir un frein doux et progressif. Enfin, les rondelles en PTFE (téflon) ne nécessitent aucun entretien.
Un frein rapide est une option de confort intéressante que l'on trouve de plus en plus facilement. Il permet de passer d'une bobine libre à un frein de combat en un seul tour de molette voire même en un demi tour seulement. Ce type de frein se nomme "Quick Drag", "Fast Drag", "Instant Drag" ou encore "Hi-Speed Drag" (et certainement d'autres désignations du même genre).
De nos jours, tous les systèmes de frein sont équipés d'une molette micrométrique, ce n'est plus véritablement un différenciateur entre les produits. Elle permet un réglage très fin et précis du frein en offrant des "clics" (crans) très rapprochés les uns des autres.
De nos jours, les bâtis et rotors des moulinets sont réalisés en matériaux composites ou en métal léger (magnésium ou aluminium). L'acier a quasiment disparu des moulinets de surfcasting modernes car lourd et sujet à la rouille.
Par ordre croissant de technicité et de valeur, on trouve d'abord au bas de l'échelle les matériaux composites à base de graphite. Il s'agit de matériaux simples et économiques car faciles à mouler mais relativement peu évolués. Ils intègrent les moulinets d'entrée de gamme.
Arrive ensuite l'aluminium, un matériau léger et rigide, facile à travailler. Il est employé sur de nombreux moulinets depuis des décennies.
Au dessus se place le magnésium, plus léger et plus rigide encore que l'aluminium il est longtemps resté le matériau haut de gamme par excellence. L’inconvénient du magnésium est la nécessité d'y apporter un traitement anti-corrosion qui élève davantage le coût de ce matériau déjà onéreux.
Enfin, au sommet de la hiérarchie se trouvent les composites contenant des fibres de carbone. Avec une densité suffisante en fibres de carbone, ces matériaux atteignent la robustesse et la rigidité du magnésium mais peuvent se montrer encore plus légers tout en étant parfaitement insensibles à la corrosion marine (gros avantage). En revanche, les opérations de moulage sont beaucoup plus délicates avec ce type de composite qu'avec une résine enrichie au graphite (en poudre ou en purée), le coût de fabrication des composites à fibres de carbone est donc bien supérieur.
Les marques font la promotion de leurs matériaux sous des appellations commerciales difficiles à identifier alors voici quelques unes de ces appellations et le type de matériau auquel chacune se rapporte.
Matériau | Daiwa | Shimano | Okuma |
---|---|---|---|
Composite à fibres de carbone | Zaion et DS5 | Ci4+ et Ci4 | C-40X |
Composite à base de graphite | DS4 | XGT-7 et XT-7 | Graphite (GR) |
Magnésium | Air Metal | Hagane Body* | Litecast |
Aluminium | HardBodyz | Hagane Body* | Alumilite |
*Shimano Hagane Body rassemble des bâtis faits en magnésium et des bâtis en aluminium, selon les modèles.
Les matériaux ont une incidence sur la rigidité du bâti et du rotor, sur leur robustesse et sur le poids total du moulinet. Il n'est donc pas utile de comprendre les matériaux pour choisir un moulinet, le plus simple est de s'intéresser au poids total du produit en faisant confiance au fabricant en ce qui concerne sa robustesse et sa rigidité. Il est en effet très rare de casser un moulinet de surfcasting en usage normal (rare mais pas impossible, j'en sais quelque chose).